Bretagne et Grand Ouest

Ouest FrancePublié dans Ouest France le samedi 7 septembre 2013: « Pas de frappe, dialogue humanitaire »

 

EDITO.
Pas de frappe, dialogue humanitaire

« À chaque dirigeant présent au G20, je lance un appel du fond du cœur pour qu’ils contribuent à trouver des voies afin de surmonter les positions conflictuelles et qu’ils abandonnent la poursuite inutile d’une solution militaire »», a affirmé le pape François dans une lettre au président du G20, Vladimir Poutine.

« La solution doit être politique et s’inscrire dans le cadre de l’Onu », a déclaré Herman Van Rompuy, président du Conseil européen. Le secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-Moon, a renchéri: « Nous devons éviter une militarisation accrue du conflit et revitaliser la recherche d’un règlement politique. Le recours à la force n’est légal qu’en cas de légitime défense et lorsque le Conseil de sécurité approuve une telle action. »

Les évêques des États-Unis ont écrit au président Obama, le priant de renoncer à la force. Les évêques du Moyen-Orient mettent en garde contre une intervention armée qui signifierait « le risque d’une guerre mondiale ». Mêmes appels de la part de multiples organisations telles que Pax Christi ou Sant’Egidio. Andréa Riccardi, son fondateur, appelle la communauté internationale « à la négociation. Cette voie n’est pas un signe de faiblesse, mais d’audace politique ».

Cette unanimité dans le désaveu du projet de frappes est impressionnante. Il est évident que l’Union européenne ne suit pas, pas plus que les pays émergents. Nombreux sont ceux qui critiquent la « prétention » des États-Unis et de la France à s’ériger en justiciers. S’il y a unanimité pour condamner le recours aux armes chimiques interdites, le refus des répliques violentes envisagées est quasi-général.

Non à la violence, oui à la solidarité

Comment, dans ces conditions, les États-Unis et la France, ainsi isolés sur ce point, pourraient-ils recourir à la force alors que leurs dirigeants n’envisageaient de le faire, faute d’accord du Conseil de sécurité, qu’à partir d’une grande coalition ? Désormais, pour les États-Unis et la France, qui se sont tellement avancés, le problème est de trouver le moyen de ne pas perdre la face.

Presque tous ceux qui se sont exprimés et refusent les frappes ont rappelé l’immense drame humanitaire qui se joue en Syrie: deux millions de réfugiés, cinq millions de personnes déplacées. Aujourd’hui, a dit Ban Ki-Moon, « il est impératif de mettre fin à cette guerre ». Les fonds d’aide aux réfugiés sont presque épuisés. À partir d’octobre, nul ne sait comment on pourra secourir ces millions de personnes plongées dans la misère alors que l’hiver approche…

C’est là que la communauté internationale doit désormais concentrer son action, sous l’égide de l’Onu, avec l’appui de l’ensemble des nations, à commencer par celles qui se sont les plus impliquées. Il faut obtenir que le gouvernement syrien comme l’armée de libération cessent le feu, fassent une trêve qui permette d’organiser le secours humanitaire.

Voilà l’occasion pour la France de sortir par le haut de la crise dans laquelle elle est plongée: prendre la tête de ce grand effort indispensable et oser appeler tout le monde à relever cet énorme défi. La France devrait s’atteler dès maintenant à cette tâche car c’est à partir de cette visée humanitaire que pourraient reprendre les échanges diplomatiques avec tous les partenaires, sur un autre ton que celui de la violence: celui de la solidarité.

François Régis Hutin

 

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