Publié dans Ouest France le dimanche 1 septembre 2013: « La paix par le dialogue plus que par les armes »
EDITO.
La paix par le dialogue plus que par les armesTout le monde condamne cette abominable agression au gaz qui a causé la mort de plusieurs centaines de personnes en Syrie. Évidemment, il faut sanctionner cette violation du traité de 1925 qui interdit l’utilisation de ce type d’armes.
Comme l’a dit John Kerry, « nous ne pouvons détourner le regard ». C’est sur ce principe de base que se fonde l’éventuelle intervention car il faut éviter tout risque de prolifération dans ce domaine.
Mais la réponse envisagée est-elle appropriée? Après l’émotion qui a suscité les divers mouvements de forces occidentales en Méditerranée, l’hésitation était survenue. La preuve formelle n’est pas encore donnée qu’il s’agit bien d’une attaque perpétrée par le dictateur. Cela a conduit au refus émis par le parlement britannique, par l’Allemagne, par l’Italie… Cependant, les Américains sont convaincus de la culpabilité d’al-Assad et donnent des éléments de preuve.
Par ailleurs, le conseil de sécurité de l’Onu est toujours bloqué par les veto russe et chinois. Agir malgré ces veto serait remettre en cause le fonctionnement de l’Onu et déprécierait cette institution qui marque, malgré ses imperfections, une avancée importante des nations vers la concertation et l’entente. Ce serait créer un précédent dangereux pour la paix dans le futur, ce serait ruiner la confiance et l’espérance que beaucoup placent heureusement dans cette institution.
Le président de l’Onu, Ban Ki-moon, a appelé à la modération et à rechercher d’autres moyens pour réagir car il voit qu’une telle intervention pourrait entraîner de désastreuses conséquences pour les populations, la stabilité de la région, la paix dans le monde…
Exiger des couloirs humanitaires
Il n’est d’ailleurs pas le seul à appeler au calme. Le pape François qui a reçu, jeudi, le roi Abdallah de Jordanie, estime que « la voie de la négociation et du dialogue est l’unique option ». Il est en plein accord avec les patriarches chrétiens de la région qui redoutent une extension du conflit et craignent les effets collatéraux des frappes envisagées, comme on l’a vu dans les conflits afghans et irakiens. Certains, comme Grégoire III, le Patriarche gréco-melkite d’Antioche, d’Alexandrie et de Jérusalem, proclament même qu’une telle intervention serait « un acte criminel »!
Tout cela explique bien l’embarras de ceux qui veulent agir, notamment France et États-Unis qui semblent malgré tout décidés à entreprendre une action militaire. Ils se sont tellement avancés dans leurs proclamations et leurs gesticulations stratégiques que, s’ils ne faisaient rien, ils perdraient toute crédibilité. Voilà pourquoi la probabilité d’une intervention persiste malgré tous les appels au calme.
Le président Hollande a souligné, lui aussi, que la véritable solution à la crise actuelle ne peut qu’être politique. C’est la sagesse même. Mais il n’est pas certain que la solution politique soit facilitée par la frappe violente envisagée par les seuls pays France et États-Unis. Elle pourrait, au contraire, brouiller encore davantage cette situation dramatique.
C’est l’action diplomatique qui doit primer et la discussion entre tous. Ainsi, le roi de Jordanie convoque une conférence sur la situation des chrétiens au Moyen-Orient dont nous connaissons la souffrance. Les diplomates des pays concernés devraient, en urgence, faire de même et exiger, entre autres, les couloirs humanitaires qui permettraient de soigner et de ravitailler les populations.
François Régis Hutin